- Premier League
- Florian Poras
Une équipe qui tient sur la durée
Leaders pour la toute première fois au lendemain de la treizième journée de championnat, une question subsistait quant à la situation des Foxes : ces hommes sont-ils capables de tenir sur la durée et de rester en haut du classement jusqu’à la fin de la saison ? Cette question, on pouvait également se poser à propos de l’équipe d’Angers, en Ligue 1, dauphin du Paris Saint-Germain à la même époque. Si les hommes de Stéphane Moulin, cinquièmes du championnat de France à l’heure actuelle, semblent s’essouffler et être sur une pente descendante, ceux de Claudio Ranieri ont l’air, quant à eux, de bien s’accrocher en haut du tableau. On aurait pu croire à une épopée éphémère, à un simple moment de grâce de passage. Que nenni. Avec leur merveilleux succès à l’Etihad Stadium ce week-end, les Foxes ont fait taire les plus sceptiques, qui les croyaient encore incapables d’aller jusqu’au bout. Plus de doute possible, cette équipe est bien en lice pour le titre. À présent, elle est même favorite, et regarde, avec cinq longueurs d’avance sur son dauphin, la Premier League de haut. Après avoir battu Tottenham et Manchester City, les Foxes auront, ce week-end, l’occasion de terrasser Arsenal, autre concurrent dans la course au titre. La rencontre se disputera cette fois dans de tout autres circonstances que lors du match aller, lors duquel les Foxes avaient été balayés à domicile (2-5). Huitièmes à l’époque, c’est cette fois avec une tête de leader qu’ils regarderont, dans les yeux, les Gunners. Avec un pas de plus vers le titre à la clef.
Des joueurs insouciants bourrés de talent
Bien qu’encore loin, niveau budget, des effectifs d’Arsenal, de Manchester City ou de Manchester United, l’équipe de Leicester assume ses complexes financiers et les pépites dont elle est garnie n’ont rien à envier à celles des clubs concurrents. Jamie Vardy travaillait à l’usine et n’était qu’un simple amateur une décennie plus tôt, il est à présent meilleur buteur du plus prestigieux des championnats européens avec dix-huit réalisations. Riyad Mahrez évoluait en Ligue 2 il y a deux ans. Acheté moins d’un million par Leicester à Le Havre en 2014, Vincent Labrune avait refusé de le faire signer à l’OM : « Pensez-vous réellement que des joueurs de Leicester comme Riyad Mahrez peuvent aujourd’hui avoir leur place à l’OM dans le projet qui est le nôtre ? », avait même lâché le président olympien, qui doit probablement se mordre les doigts à l’heure qu’il est au vu des performances, match après match, du footballeur algérien, auteur d’un nouveau but merveilleux ce week-end face à Manchester City. Et puis, il y a aussi N’Golo Kanté. Acheté par Leicester à Caen cet été, le milieu de terrain français est l’un des grands artisans des performances actuelles de son équipe. Titulaire indiscutable dans l’effectif des Foxes, il est la plaque tournante de cette équipe de Leicester. Moins exposé que la paire Vardy-Mahrez, l’ancien Caennais a pourtant une importance dans l’entrejeu aussi capitale que ses deux coéquipiers. Ces trois-là symbolisent une équipe en pleine bourre et sans peur. En plus du talent inéluctable de ses joueurs, Leicester a aussi cette insouciance, qui lui permet d’être aussi haut au classement et d'être redoutée de ses adversaires. Les Foxes ont cette désinvolture, qui les différencie de leurs concurrents et qui fait leur force. Malgré leur place de leader, les hommes de Claudio Ranieri n’ont pas de pression sur leurs épaules, jouent libérés. Cette simplicité fait tout le charme actuel de cette équipe de Leicester, qui nous fait vibrer, rêver avec elle.
Parce qu'ils le méritent !
De par l’écart de budget de Leicester par rapport aux autres écuries anglaises, la pole position actuelle des hommes de Claudio Ranieri est plus qu’admirable. Plus que l’argent, c’est le jeu qui est, cette fois, récompensé. Malgré un effectif, sur le papier, en-dessous de leurs concurrents au titre, les Foxes sont la meilleure attaque du championnat anglais et, doit-on le rappeler, leaders de Premier League à presque dix journées de la fin, ce qui constitue déjà un exploit extraordinaire, bien au-delà des attentes de début de saison. Les Renards, qui avaient pour objectif ni plus ni moins que de se maintenir, vivent un véritable conte de fées, comme les joueurs de Nottingham Forrest en 1978, sacrés champions aux dépens du grand Liverpool, double champion en titre. L’Angleterre s’apprête à vivre, comme il y a trente-huit ans, une nouvelle grande surprise et connaître un chambardement d’ampleur : depuis plus de vingt ans et le sacre de Blackburn en 1995, jamais une autre équipe que le Big Four anglais (Manchester United – Manchester City – Arsenal – Chelsea) n’a été sacrée championne. Les joueurs de Leicester, rebelles, font face aux gros et l’Angleterre les soutient dans leur périple. On est dans le mythe du petit qui défie les grands, les yeux dans les yeux. Sauf qu’à l’heure qu’il est, Leicester n’a plus rien d’un petit poucet, mais a tout d’un ogre, prêt à chambouler les codes d’un championnat anglais accoutumé depuis quelques années à offrir son trophée aux habitués. En Championship il y a deux ans et lanterne rouge de Premier League à la même époque l'an dernier, Leicester s’apprête à réaliser quelque chose de grand. De très grand. Et l’Angleterre s’émerveille avec eux. Tenez bon les gars, plus que treize journées !