- Histoire
- Alan Bernigaud
Des parcours bien différents
Le 12 juin 2004, le flamboyant nouveau stade de Porto, l’Estadio do Dragao accueille le match d’ouverture de l’Euro portugais. Si la fête est grande, le match des locaux est assez inquiétant, les joueurs n’arrivent pas à se trouver et finalement, le match s’achève sur une victoire de la petite nation du football qu’est la Grèce. Et pourtant, ce match d’ouverture ne sera qu’un entraînement pour ces deux équipes qui, déjouant tous les pronostiques, vont se retrouver de nouveau face à face un mois plus tard, en finale de la plus grande compétition du football européen.
Dans une ambiance enflammée, la majorité des 62 166 spectateurs de l’Estadio da Luz est entièrement acquise à la cause des Portugais, pour qui la coupe semble destinée. Les hommes de Felipe Luiz Scolari n’ont connu pour seul revers que le match d’inauguration face à la Grèce et depuis ils ont battu la Russie, l’Espagne, l’Angleterre et les Pays-Bas. Ce que l’ont peut appeler un parcours de futur champion. Surtout qu’en face, la Grèce n’est sorti que des poules qu’avec une seule victoire et a battu la France contre le cours du jeu et le véritable favori de cette compétition, la République Tchèque du beau Pavel Nedved, une nouvelle fois sans dominer. Mais emmené par un Theodoros Zagorakis en feu et qui finira meilleur joueur du tournoi et un Angelo Charisteas décisif, la Grèce ne compte pas s’arrêter là et sait qu’elle peut compter sur la stratégie de contre-attaques éclairs adopté par son sélectionneur allemand Otto Rehhagel.
Une finale des Grecs à l’image de leur parcours
Porté notamment par une attaque de rêve composée du capitaine légendaire Luis Figo, de l’esthète Deco, du serial buteur Pauleta et de la pépite Cristiano Ronaldo, le onze portugais a fier allure et s’empare, dès les premières minutes, du ballon. Il ne faut que quatre minutes au jeune Ronaldo pour allumer la première mèche que contre tant bien que mal Takys Fyssas (4e). Figo va lui montrer l’étendue de sa classe en éliminant trois défenseurs pour finalement obtenir un corner qui ne donnera rien (7e). Très vite, les Portugais comprennent que le 4-3-3 à résolution défensive de leurs adversaires, va leur poser problème. Car si le duo récupérateur Maniche-Costinha du 4-2-3-1 des Lusitaniens est une véritable machine à la récupération, les deux compères sont victimes du harcèlement systématique des Grecs lorsqu’ils ont le ballon.
S’engage alors une véritable bataille au milieu de terrain dont la première victime va être le spectacle lui-même, les occasions de but se faisant rare. La pression des Grecs est telle que la rencontre devient incertaine et seuls les gestes techniques de Ronaldo ou les passes millimétrées de Deco aident les Portugais à se sortir du piège. D'ailleur Juste avant la mi-temps, un coup dur va arriver, l’arrière droit Miguel se blesse tout seul et bien qu’il refuse de quitter la pelouse, Scolari est contraint à le remplacer par Paulo Ferreira (43e). Lorsque les deux équipes quittent le pré pour la mi-temps, il est évident que l’on est dans un match où le premier qui ouvrira le score gagnera.
Le réalisme comme credo
Au retour des vestiaires, les joueurs portugais sont plus motivés que jamais. S’appuyant sur leurs deux ailiers, les ouailles de Scolari font passer un mauvais premier quart d’heure à des Grecs que l’on sent prêt à céder par deux fois sous les coups de Deco. Une première fois, le joueur du FC Porto tente sa chance de prêt de 40 mètres, mais la balle s’envole un peu trop (50e) avant de se faire accrocher dans la surface après un dribble aussi efficace que délicieux, mais l’arbitre de la rencontre Markus Merk ne siffle pas faute (52e). Finalement, ce qui devait arriver arriva. Après une spectaculaire percée dans la défense portugaise, Seitaridis voit son centre dévié en corner par Cristiano Ronaldo. Le coup de pied de coin est bien botté par le capitaine Zagorakis et Ricardo sort maladroitement de ses bois, gêné par Costinha, le portier ne peut empêcher Angelo Charisteas de propulser le ballon dans les buts vides d’une tête rageuse (56e). Le peuple grec laisse exploser sa joie et certains joueurs semblent au bord des larmes à l’idée d’être à trente minutes de remporter le premier titre en football de l’histoire de leur nation tandis que les Portugais sont littéralement assommés. Scolari fait immédiatement rentrer Rui Costa à la place de Costinha pour améliorer son armada offensif déjà impressionnant (59e), Cristiano lâche une frappe puissante qui fini en corner (60e), Figo voit le gardien grec, Antonios Nikopolidis sortir avec difficulté sa lourde frappe (63e).
Le match semble alors s’emballer, mais la désormais totale domination portugaise est tout ce qu’il y a de plus stérile, les joueurs en rouge s’énervant de plus en plus, ne parvenant pas à s’approcher des buts grecs et ne pouvant être dangereux qu’en frappant de loin ce qui est trop aléatoire. Pire, à quinze minutes du terme, Cristiano Ronaldo s’en va affronter Nikopolidis dans un face-à-face crucial, mais le joueur de Manchester United perd ce duel (74e). Les minutes s’écoulent et après cinq minutes de temps additionnels toujours aussi infructueuses pour les Portugais, Monsieur Merk siffle la fin de cette rencontre, sacrant pour la même occasion cette équipe de Grèce que personne n’attendais et qui par une solidarité sans faille, un collectif bien huilé et une stratégie efficace, aura su s’imposer en venant à bout des trois favoris de ce tournoi, la France, la République Tchèque et le Portugal. L’histoire retiendra les larmes de Ronaldo et des millions de supporters, la mine déconfite de Pauleta et Figo et cette joie pure, presque enfantine qui est gravée sur les visages des Grecs. L'Euro 2004 a vu comme l'Euro 1992 un outsider complet remporter la compétition. Et si cela devenait une habitude que tous les trois Euros ce soit une équipe surprise qui gagne ? La réponse le 10 juillet ! Car oui, nous y sommes, c'est le troisième tournoi depuis l'édition au Portugal. Alors, qui va bien pouvoir succéder au Danemark et à la Grèce ? L'Islande ? La Roumanie ? L'Irlande ?
A vos pronostique !
Composition des équipes :
PORTUGAL
1 Ricardo
13 Miguel remplacé par Paulo Ferreira (43e)
16 Ricardo Carvalho
4 Jorge Andrade
14 Nuno Valente
6 Costinha remplacé par Rui Costa (60e)
18 Maniche
7 Luís Figo (cap.)
20 Deco
17 Cristiano Ronaldo
9 Pauleta remplacé par Nuno Gomes (74e)
Sélectionneur : Luiz Felipe Scolari
GRÈCE
1 Antonios Nikopolidis
2 Giourkas Seitaridis
5 Traianos Dellas
19 Michalis Kapsis
14 Takis Fyssas
8 Stelios Giannakopoulos remplacé par Stylianos Venetidis (76e)
6 Angelos Basinas
7 Theodoros Zagorakis (cap.)
21 Kóstas Katsouránis
9 Angelos Charisteas
15 Zisis Vryzas remplacé par Dimitrios Papadopoulos (81e)
Sélectionneur : Otto Rehhagel
Les stats:
Portugal Grèce
Possession du ballon 58% 40%
Tirs cadrés 5 1
Total tirs 17 4
Fautes commises 18 19
Corners obtenus 10 1
Hors-jeu 4 3
Cartons jaunes 2 4
Cartons rouges 0 0