- Euro 1980
- Thomas Maitre
Au vu du succès des précédentes éditions du championnat d’Europe des Nations, l’UEFA souhaite élargir la phase finale en augmentant le nombre de participants et la durée de la compétition. Le pays organisateur est désigné au préalable après études des dossiers de candidatures. En 1980, l’Italie est pays hôte et donc qualifié d’office. 31 équipes sont alors réparties en 7 groupes (3 de 5 et 4 de 4) et s’affrontent en match aller-retour dans la phase éliminatoire.
A noter lors de ce tour éliminatoire le déclin des équipes de l’Est car seule la Tchécoslovaquie, tenante du titre, parvient à se qualifier. La Yougoslavie, seconde de son groupe derrière l’Espagne, est éliminée tout comme la grande Union Soviétique qui termine même bonne dernière. Il faut dire qu’à l’époque, le pays se retrouve au centre d’un conflit mondial. Toujours englué dans la guerre froide, les relations avec le monde extérieur se sont encore dégradées suite à l’invasion de l’Afghanistan en 1979. En plus d’une bonne partie de l’Europe, les Etats-Unis s’opposent également aux Soviétiques et la troisième guerre mondiale semble imminente. Ces tensions ont inévitablement des répercussions sur le sport. Plusieurs nations (dont les Etats-Unis et l’Allemagne de l’Ouest) souhaitent boycotter les Jeux olympiques d’été qui doivent se dérouler à Moscou au mois de Juillet 1980. Difficile donc pour l’équipe nationale Soviétique d’évoluer dans un tel contexte lors des qualifications pour l’Euro. La défaillance des nations de l’Est de l’Europe laisse donc le champ libre aux cadors de l’Ouest.
De son côté, l’équipe de France connaît une nouvelle désillusion lors de ces éliminatoires. Pourtant revenu avec les honneurs du mondial 78 qui se tenait deux ans plus tôt en Argentine, où les bleus avaient certes été éliminés dès le premier tour mais avaient tenu tête aux redoutables Italiens et Argentins, la génération Platini n’y arrive toujours pas. Elle termine deuxième de son groupe derrière les fameux Tchèques, vainqueur de l’Euro il y a 4 ans grâce à un certain Antonin Panenka...
Le plateau des équipes qualifiées est alléchant. Mais dès les premiers matchs, les stades sonnent creux. En plus de l’hostile climat politique général, le football Italien connait une grave crise depuis le mois de Mars 1980 suite au scandale du Totonero. Une sombre affaire de matchs truqués (tiens, déjà ??) qui implique un grand nombre de joueurs professionnels et certaines organisations mafieuses. Des internationaux comme Paolo Rossi sont soupçonnés et suspendus. La Squadra azzura n’est donc que l’ombre d’elle-même pendant ce tournoi et les supporters Italiens désertent les stades. Si les tribunes ne sont que partiellement remplies, certains pseudo-supporters font néanmoins beaucoup parler d’eux, sur et en dehors des terrains. On les appelle Hooligans. Ce fléau, qui prenait de l’ampleur depuis quelques temps (comme lors du quart de finale de l’Euro 76 entre le Pays de Galles et la Yougoslavie), éclate aux yeux du monde entier. Ces individus sont majoritairement Anglais. Cette violence grandissante et gratuite assombrit un peu plus le tableau de cet Euro et le spectacle s’en ressent. Hormis la rencontre entre la RFA et les Pays-Bas (remporté 3-2 par les Allemands), les matchs sont d’un faible rendement technique et tactique. Ils sont à l’image de l’ambiance, tendus.
Difficile dans ces conditions de se concentrer sur le football. La RFA se retrouve une nouvelle fois en finale en compagnie de la surprenante Belgique, leader de son groupe devant les défaillants Anglais et Italiens. L’Espagne ferme la marche. Les Allemands de l’Ouest de Karl-Heinz Rummenigge vont tenir leur rang et s’imposer 2 buts à 1 devant un peu de moins de 48000 spectateurs. La fin de la compétition est presque un soulagement pour les Italiens, mais pas seulement. Alors que les précédentes éditions furent couronnées de succès, l’Euro 1980 restera comme un rendez-vous manqué, alors que toutes les conditions semblaient réunies. La nouvelle organisation mise en place par l’UEFA (avec notamment la suppression des demi-finales) n’a pas emballé les foules, mais le principal responsable de cet échec est bien la bêtise humaine, tout simplement.