- Panama
- Alan Bernigaud
Chaque édition de Coupe du monde voit une nation insolite ou inattendue être engagée parmi les 32 qualifiés. 1998 a eu la Jamaïque, 2002 la Chine, 2006 le Trinité-et-Tobago, 2010 la Nouvelle-Zélande, 2014 la Bosnie-Herzégovine. Cette année en Russie, ce sera le Panama. Et tout dans la qualification du Panama pour ce Mondial tient du parcours du petit poucet bien décidé à jouer un mauvais tour à ses adversaires. Car le Panama, c'est avant tout une petite nation de 3,7 millions d'habitants, mais qui contrôle l'un des points de passage maritime les plus importants au monde. Tout le pays n'est qu'un isthme reliant l'Amérique du Sud au reste du continent américain, traversé par un canal. Si l'on se reporte au football, là également le Panama n'est qu'une maigre équipe . Mais durant la phase de poules, tous ses adversaires du groupe G ont coché la date de leur match contre les Canaleros. Pourquoi ? Tout simplement parce que si les Panaméens ont l'équipe la plus faible de la poule et que la Belgique, l'Angleterre et la Tunisie comptent bien empocher les trois points face à eux, ils ont surtout prouvé tout au long des éliminatoires qu'ils ne sont pas là pour faire du tourisme.
Second du groupe B durant le quatrième tour de qualification derrière le Costa Rica avec trois victoires, un nul et deux défaites, le Panama a entamé la course à la Russie bien plus tôt que bon nombre de pays engagé dans cette Coupe du monde. Depuis novembre 2015 pour être précis, avec ce premier mini championnat qualificatif. En terminant deuxième, le Panama est passé au cinquième et dernier tour dans une poule de six équipes et c'est là que les joueurs d'Hernán Darío Gómez ont vraiment impressionné. Alors certes, au niveau comptable, le bilan est mitigé avec trois victoires, trois défaites et quatre matchs nuls. Mais dans le jeu, les Panaméens répondent présents et lorsqu'arrive le dernier match de cette poule unique, rien n'est encore fait. Le Mexique, loin devant, est déjà qualifié depuis un moment pour le Mondial, tout comme le Costa Rica mais la troisième place du podium offre, elle aussi, un ticket pour la Russie tandis que la quatrième place est synonyme de barrage.
LISTEN: #panama reach 1st @FifaWorldCup. @markgleesonfoot or @no1commentator if @bafanabafana beat Senegal twice? pic.twitter.com/gxGyAxkU4A
— Neal Collins (@nealcol) 11 octobre 2017
Nous sommes le 11 octobre, les trois matchs de ce soir-là seront déterminants pour savoir quelle place occupera chaque nation au final. Le Mexique, premier et déjà qualifié affronte le Honduras, 5e avec 10 points et une différence de buts négative de -7. Le Trinité-et-Tobago, dernier et largué au classement reçoit les États-Unis, 3e avec 12 points et pour qui, un simple nul suffirait à s'octroyer la troisième place au vu de leur goalaverage positif. Enfin, le dernier match voit le Costa Rica, qualifié et certain de rester second, se déplacer sur la pelouse du Panama, quatrième avec 10 points et -2 de goalaverage.
Ce soir-là, aucun score ne respecte la logique. Les États-Unis s'effondrent complètement et perdent 2 buts à 1 tandis que le Honduras va s'imposer 3-2 face à un Mexique remanié. À Panama City, malgré leur public, les locaux n'arrivent pas à se défaire du Costa Rica. Pis encore, ce sont leurs adversaires qui ouvrent le score à la 36e minute. Même l'égalisation (qui aurait dû être refusée) de l'avant-centre Gabriel Torres, au retour des vestiaires, n'y fait pas. Le Panama est bien parti pour être le grand perdant de cette soirée surprenante.
Mais c'était sans compter sur le capitaine courage des Canaleros ! On joue la 87e minute quand sur une (très) longue remise de la tête d'un coéquipier, le défenseur central, monté aux avant-postes, décoche une énorme reprise de volée sous la barre depuis le point de penalty. C'est alors tout un pays qui peut exulter, la conjoncture extraordinaire des matchs de ce 11 octobre propulse le Panama en phase finale d'une Coupe du monde pour la première fois de son histoire. Un événement d'une telle importance que même le Président s'enflamme au point d'annoncer sur Twitter que le lendemain sera un jour férié afin que tous les habitants puissent faire la fête.
Es un día histórico para el país. Mañana será libre para los trabajadores del sector público y privado.
— Juan Carlos Varela (@JC_Varela) 11 octobre 2017
Les autres équipes du groupe B sont prévenues, l'équipe du Panama sera peut-être la plus faible en Russie, mais elle compte bien continuer à écrire en lettres d'or les pages de cette aventure. Et tant pis si pour faire un résultat, il faudra attendre la 87e minute de chaque match.