- Coupe du monde 2018
- Alan Bernigaud
La France ne sera pas représentée que par ses joueurs et ses supporters en Russie, des officiels s'y rendront également pour assister à la Coupe du monde. C'est ce qu'a assuré, ce matin sur France Inter, Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères et également chef de la diplomatie française. "Nous avons des intérêts communs avec la Russie. C'est un grand pays de notre environnement, elle peut être un partenaire", a-t-il expliqué au micro de Léa Salamé, avant d'ajouter que dans ce contexte, "savoir si l'on va à la Coupe du monde ou non" est un problème secondaire. "La question ne se pose pas comme cela", a-t-il conclu.
Pourtant, si la France semble, selon ses dires, vouloir envoyer une délégation en Russie pour assister aux cérémonies officielles et à certains matchs, ce n'est pas le cas d'autres pays. Le Royaume-Uni a ainsi annoncé hier que les membres du gouvernement et de la famille royale britannique boycotteront cette Coupe du monde de football. Pour cause, le décès d'un ancien espion russe qui a été empoisonné à Salisbury, dans la banlieue de Londres, en mars dernier. Un assassinat que la justice britannique attribue aux services secrets russes, l'homme décédé étant un agent double. Cette histoire a marqué une rupture diplomatique entre le Royaume-Uni et la Russie, Londres ayant notamment expulsé 23 diplomates russes du territoire britannique, un acte qui a été immédiatement reproduit par le Kremlin qui a lui aussi renvoyé 23 fonctionnaires anglais chez eux. Depuis, la situation n'a fait qu'empirer, le Royaume-Uni et la Russie ne cessant de se renvoyer la responsabilité de cette escalade des tensions diplomatiques.
Jean-Yves Le Drian : "Toutes les conditions sont réunies pour qu il y ait un embrasement" https://t.co/kln4Zl2SY8 pic.twitter.com/fOqsowAGAL
— France Inter (@franceinter) 23 mai 2018
Mais le Royaume-Uni n'est pas le seul à avoir des griefs contre la Russie de Vladimir Poutine. Ainsi, l'Islande a elle aussi annoncé que ses représentants officiels boycotteront les matchs et cérémonies de la Coupe du monde qui débute le 14 juin, en soutien au boycott britannique. La diplomatie islandaise a expliqué que "l'attaque de Salisbury constitue une violation grave du droit international et menace la sécurité et la paix en Europe". Des propos forts, d'autant plus que 16 pays européens ainsi que les l'Ukraine, le Canada et évidemment les États-Unis ont déjà réagi à ce meurtre en expulsant des diplomates russes de leurs territoires.
Si ces mesures peuvent paraître disproportionnées, c'est que la Russie et la majeure partie des autres pays occidentaux ne sont pas opposés qu'au sujet de cet empoisonnement. Cette Coupe du monde va se dérouler avec, comme toile de fond, un pays dont le pouvoir autoritaire est soupçonné par de nombreux observateurs internationaux de truquer les élections, d'opprimer les contestataires et ne pas toujours respecter les Droits de l'Homme. Autant d'éléments qui poussent les associations humanitaires du monde entier à appeler à un boycott total de cette Coupe du monde, de la part des joueurs notamment, comme ce fut le cas avec la légende Johan Cruyff qui avait refusé de participer au Mondial 1978 en Argentine pour protester contre la dictature de Jorge Rafael Videla.
L'Islande décide un boycott diplomatique de la Coupe du monde en Russie https://t.co/wLZppdbdQ4 pic.twitter.com/x3nL0xZSkv
— SudOuest Sport (@SudOuest_Sport) 26 mars 2018
Enfin, comme si la situation n'était pas déjà assez complexe, le rôle joué par la Russie au Moyen-Orient, et surtout dans la guerre qui se déroule en Syrie depuis de nombreuses années, est encore obscure. Pis, il est en opposition aux intérêts et à la volonté de la coalition internationale, menée notamment par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni. Si Jean-Yves Le Drian compte sur le fait qu'une délégation française se rendra en Russie pour la Coupe du monde, c'est donc avant tout une stratégie géopolitique, la France ayant de grands intérêts en jeu dans une partie où la Russie joue un rôle majeur, que ce soit en Syrie ou sur la sauvegarde de l'accord sur le nucléaire iranien que les États-Unis ne reconnaissent plus.
Durant ce mois de juin, le football sera célébré dans le monde entier, mais, peut-être qu'au plus près des joueurs, dans les loges VIP des stades russes, se jouera un jeu ressemblant bien plus à des échecs qu'à du football.