- Billet d'humeur
- Aurelien Renault
On ne va pas parler de vent de catastrophisme, ce serait exagéré. Encore que… Si Kylian Mbappé n’était pas venu finalement égaliser en fin de match contre une équipe américaine insolente de réussite, il est à peu près certain que la foudre médiatique se serait abattue sur l’équipe de France. « Ça fait un peu désordre quand même » titrait Eurosport.fr au sortir de la rencontre. « L’ombre du doute » rajoutait Le Parisien quand les débatteurs de la chaîne L’Equipe remettaient un par un les choix de Didier Deschamps en question. Dur de dire si c’est une réaction franco-française mais pour répondre à ce flot de critique pré-Mondial, on pourrait rétorquer qu’il n’y a franchement pas le feu au lac. Loin de là. « Pas de quoi en faire un drame » écrivait dans ce sens Maxime Brigand, l’envoyé spécial de So Foot. Et pour cause : les matchs de préparation sont des matchs test typiquement parce qu’on peut se permettre d’y greffer ce genre d’insuffisances et d’imprécisions. Parce que les Bleus sont justement encore « en préparation » avec de grosses séances physiques dans les pattes. Il ne faut pas l’oublier.
Rien ne sert de courir…
« Les Bleus ont encore du travail » résumait donc à raison le site internet de L’Equipe. A ceux qui imaginent qu’on doit tirer un trait sur ses ambitions mondiales à cause d’une préparation qui n’accouche pas d’un 100% dans la catégorie victoires, revoyez donc vos fiches. Le Portugal, sacré champion d’Europe après 3 matchs nuls lors de l’Euro 2016, a prouvé que rien ne servait de courir… Vous connaissez la suite. L’Allemagne, championne du monde en titre, était loin d’avoir convaincu tout le monde il y a quatre ans malgré le souvenir qu’elle nous a laissé. En préparation au printemps 2014, elle n’avait gagné qu’un match sur trois contre la modeste Arménie (6-1) et n’avait pas su l’emporter contre la Pologne (0-0) et le Cameroun (2-2). Et comment oublier qu’au cœur d’une série redoutable d’avant-titre mondial en 2010, les futurs champions espagnols s’étaient pris d’entrée les pieds dans le tapis suisse (0-1) ? Non, clairement, avant de soulever le trophée suprême, il n’est absolument pas écrit qu’un champion en devenir se doit de triompher sans discontinuer sur la route du sacre.
…il faut partir à point
Alors oui, il reste des choses à régler. L’on est encore sceptique sur le rôle des latéraux. L’erreur de Djibril Sidibé sur le but américain conjuguée à la passe décisive d’un Benjamin Pavard toujours séduisant en bleu pose question sur la hiérarchie. Mais tant mieux dans le fond, mieux vaut avoir de la concurrence à un maximum de postes. Antoine Griezmann et Olivier Giroud sont passés à côté ? Et alors ? Le Grizou héros de l'Euro 2016l match après match était sorti la tête basse lors de l’ouverture contre la Roumanie. Mais beaucoup semblent ne pas s’en souvenir. Quelle était la nature de la préparation physique des Bleus ? Contre une jeunesse américaine qui ne prépare pas de Coupe du monde, la donnée physique était un facteur prépondérant. Beaucoup d’observateurs auront oublié de voir ce qu’ils espéraient pourtant apercevoir au Groupama Stadium hier soir : un Paul Pogba retrouvé et conquérant.
Et dans tout ça, Kylian Mbappé a marqué un but qui devrait compter en Russie. Car au final dans cette préparation, outre « Donatello » (de son surnom), les joueurs qu’on espère décisifs cet été ont tous scoré ces derniers jours : Giroud, Griezmann, Dembélé et même Fékir. On pourra gronder si le rendez-vous australien est manqué mais seul le résultat final importera. Les résultats des amicaux, dans une certaine mesure, appartiennent maintenant à la sphère déjà lointaine du passé. Comme le disait La Fontaine, "rien ne sert de courir, il faut partir à point" donc. Et le départ n’a pas encore été donné.